VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION:
LES ENJEUX POUR LES SOIGNANTS

FORMATION, PLURIDISCIPLINARITÉ
ET RECOURS AUX PARTENAIRES
PERMETTENT DE FAIRE FACE
AUX SITUATIONS COMPLEXES

8 % des personnes de plus de 65 ans mobilisent 75 % des prestations fournies par les équipes pluridisciplinaires des CMS. Or, la polymorbidité, la polymédication, le polyhandicap influent fortement sur l’organisation du soin tout comme sur la nécessaire formation des soignants. Comment les soins à domicile peuvent-ils y faire face ? Nous l’avons demandé à Gwenola Eschenmoser, directrice adjointe et responsable des prestations, et à Marie-Jeanne Muller, consultante en soins infirmiers.

M.-J. Muller. La problématique des soins à domicile est particulière. En une demi-journée, une infirmière pourra successivement rendre visite à un client de 45 ans devant subir un traitement oncologique, puis un nonagénaire présentant des troubles confusionnels ou un état dépressif, puis une femme dépistée en soins palliatifs avec laquelle elle abordera ses souhaits pour la fin de vie, puis enfin faire une évaluation dans une jeune famille pour savoir si celle-ci a besoin d’une aide quelconque après l’arrivée du dernier bébé. C’est un éventail très riche de besoins auxquels il faut savoir répondre alors que le collaborateur intervient souvent seul à domicile bien qu’étant pleinement intégré dans une équipe de CMS. La variété de nos activités, tout comme le travail pluridisciplinaire, constituent bien des attraits de notre domaine qui attire les professionnels de divers horizons.

Comment se forme-t-on à cette complexité ?

M.-J. Muller. L’une des richesses de nos CMS, ce sont les colloques pluridisciplinaires. Autour de situations réelles, l’équipe (infirmières en soins généraux, santé mentale, soins palliatifs, diabétologie, assistants sociaux, ergothérapeutes, diététiciennes, auxiliaires, ASSC, etc.), met en commun les compétences pour optimiser l’analyse et le parcours de soins de chaque client. C’est un mode d’apprentissage ancré dans le concret. Nous avons aussi des colloques infirmiers à thèmes, par exemple la documentation du dossier client, les soins palliatifs ou le diabète. Ensuite, l’Association propose des heures de formation annuelles à chaque collaborateur. Il peut s’agir d’une formation de 2 jours ou d’une formation longue comme un CAS, Certificate of advanced Studies, pour laquelle la personne devra motiver sa demande. Par ailleurs, en rapport plus spécifique avec le vieillissement de la population, nous avons rédigé un document résumant les alarmes apparaissant le plus souvent dans les évaluations RAI – par exemple le risque de chute ou la douleur – et nous encourageons nos collaborateurs à se former dans ces domaines. Chaque année, les priorités de formation terrain sont identifiées en lien avec les besoins de notre clientèle.

Dans ce contexte, qui aide les équipes soignantes ?

G. Eschenmoser. Les infirmières cliniciennes ont une fonction d’encadrement des nouveaux collaborateurs et de ceux qui nécessitent un accompagnement dans l’apprentissage du dossier électronique des clients ou la réalisation de soins. Elles soutiennent les cadres de proximité par leur expertise dans leur domaine, en proposant des ateliers ou des formations continues sur des thèmes ciblés pour les équipes.

M.-J. Muller. Des infirmières spécialisées en stomathérapie (plaies, stomies, incontinence) et en diabétologie soutiennent également les équipes dans le suivi de nombreuses situations. Nous avons encore dans nos équipes des personnes ressources en soins palliatifs et en santé mentale, sollicitées par les professionnels afin de soutenir la prise en charge. L’orientation vers les Equipes mobiles est possible dans les situations qui se péjorent. 

G. Eschenmoser. En effet, les situations de soins palliatifs mobilisent une attention particulière, de même que l’anticipation de la crise dans les situations de santé mentale dans la limite des compétences des professionnels des soins à domicile. 
Mentionnons aussi le recours fréquent aux médecins traitants, aux pharmaciens, aux centres tel que celui de la mémoire, à la consultation de gériatrie, aux infirmières assurant le suivi des situations complexes, ou encore à la filière DIABEST. L’enjeu consiste à éviter des hospitalisations inappropriées et permettre aux personnes de vivre à domicile de manière autonome le plus longtemps possible.
Enfin l’aide et les soins à domicile valorisent grandement le partenariat avec les proches-aidants sans l’aide desquels le maintien à domicile n’est tout simplement pas envisageable.